Peut-on comparer la lutte de Google contre les black hat à la lutte anti dopage ?
Voici une accroche propice au buzz ! Réfléchissons donc un peu à la question...
Un sportif qui se dope se détruit lui-même, mais il oblige de plus les autres sportifs à se doper eux-mêmes, pour rester au niveau. Quelqu’un qui reste parfaitement sain a en effet très peu de chances face à des concurrents qui ont utilisé de telles substances.
C’est là le problème essentiel du dopage : le fait qu’il tend à s’imposer peu à peu aux autres, à se normaliser, à se propager, vu son efficacité.
Or ne voit-on pas la même chose dans le domaine du référencement ? Cette comparaison est-elle absurde ?
Depuis peu la multiplication des logiciels de spinning fait qu’on peut produire sans effort des centaines de textes aux phrases variant légèrement. Ces textes ne sont pas sans sens, mais ils ont souvent un style qui trahit leur origine automatique (ce sont souvent des tournures de phrase étranges, liées à l'utilisation de synonymes). Plus aucun talent de rédaction n’est demandé. Il suffit de passer au mixer d’un de ces logiciels un texte originel pour obtenir un texte contenant un lien qui va pointer vers le texte à référencer. Cela ne prend que quelques minutes, contre quelques heures pour la rédaction de vrais textes de qualité.
Ce qui fait qu’en tant que freelance seo, je m’intéresse à ce sujet, c’est que depuis quelques temps, je vois apparaître sur Google des sites concurrents sur des mots-clés essentiels à mon activité. Ceux-ci apparaissent dans les premières positions sur des mots-clés en rapport avec le référencement.
Lorsqu’on rentre sur ces sites, on voit qu’ils n’ont aucun contenu. C’est en examinant leur réseau de lien que le doute est confirmé. Leur bonne position est obtenue par leur réseau de liens : une centaine de sites qui contiennent des textes spinnés étranges.
De ce type là :
Jusqu’alors, cela ne me posait pas de problème, et je comprends l'approche black hat, qui réside dans un jeu joyeux avec l’algorithme de Google. Il y a là un côté pirate, et un côté enfant qui me séduit. Cela repose aussi sur un pragmatisme pur, qui est une position théorique que j’apprécie : ce qui importe c’est le résultat (la 1ère position sur Google), peu importe les moyens employés pour y parvenir.
Ce qui fait que je commence à m’éloigner de cette approche, c’est le succès incroyable de ces techniques, et je parle en particulier du content spinning. Je vois de plus en plus de concurrents utiliser cette technique, et sur certains mots-clés, les black hat trustent la première place. Je vois des sites vides de tout contenu (de vraies coquilles de noix) créés il y a quelques mois dépasser des sites d’une dizaine d’années, remplis de contenu de qualité, et administrés par des agences d’une quarantaine de personnes.
Inutile de signaler ces sites via un formulaire de spam : ayant testé moi-même cette solution (selon le principe justement du pragmatisme pur : ce qui compte c’est le résultat, peu importe le moyen, même s’il n’est pas très noble), j’ai pu constater qu’aucune pénalisation ne vient frapper ces sites, y compris après plusieurs mois.
Lorsque le black hat se généralise, ce n’est plus une subversion, mais cela devient une nouvelle norme. C’est le poids écrasant de cette norme qui essaie de s’imposer à moi (pour que je puisse truster les premières places, il faudrait que moi aussi j’utilise de tels logiciels) qui fait que tout d’abord je trouve cette technique moins sympathique, et ensuite que je la compare au dopage.
Evidemment, la comparaison a ses limites : le black hat ne se détruit pas, il n’y a pas mort d’homme. Mais le principe reste le même : l’efficacité actuelle du content spinning fait que les white hat sont écrasés par les black hat. Il faudrait donc devenir au minimum « grey » et utiliser, au moins dans une faible mesure, ces logiciels pour rester dans la course.
On trouve le récit d’une telle conversion sur ce site
L’auteur de ce texte au style fleuri va jusqu’à considérer (ce qui est une approche intéressante) que la rédaction de contenu ne fait pas partie du travail de référenceur, mais de celui de rédacteur. Le boulot du référenceur ce ne serait précisément autre chose qu’utiliser de tels logiciels, et de telles techniques.
D’autre part, même s’il n’y a pas mort d’homme, il y a risque de nécrose du web : comme le produit dopant tue le corps qui le reçoit, le texte spinné tue son hôte : les moteurs de recherche perdraient leur raison d’être et disparaitraient si la proportion de textes spinnés dépassaient celle des sites pertinents. Le Web 2.0 serait étouffé sous la masse infinie de ces textes "fous", comme on peut le voir ici.
Enfin le phénomène en cours se rapproche du dopage en ce sens qu’il nous oblige à prendre un risque : le jour où Google détectera mieux le content spinning, les sites de ceux qui ont utilisé ce procédé seront pénalisés. Cela génère une angoisse, analogue à celle de ceux qui se dopent (celle d’être pris ou de voir son corps affecté par ces substances).
Le sens de cet article n’est pas de critiquer l’approche black hat. Il vise à faire part du désarroi d’un référenceur, celui correspondant à la prise de conscience de l’absolue impunité actuelle des techniques de rédaction de texte automatiques. Des sites dont le positionnement repose uniquement sur des réseaux évidents de textes spinnés et signalés comme tels à Google ne sont en aucune manière sanctionnés. Ce qui fait que ces pratiques ne peuvent que se généraliser et devenir une nouvelle norme, à laquelle chacun va devoir se plier. Ce que je ne souhaite pas pour ma part.
La beauté de l’approche du pirate réside dans son jeu de cache-cache incessant avec la loi. Si la loi disparaît et qu’il devient lui-même le législateur, alors il perd ce qui faisait son charme !
Cet article aussi pour chercher des solutions que l’on pourrait mettre en œuvre pour contrer cette tendance aux réseaux de « textes fous ». Que pourraient faire les « white hat » pour piéger les « grey », tout en demeurant dans le même registre malicieux que ceux-ci ?
Telle est la question !
Note : on m'a objecté que les textes produits peuvent être d'excellente qualité, selon le temps que le référenceur aura passé à affiner ces textes, en corrigeant les tournures les plus étranges. De ce fait, ils peuvent ressembler à des textes rédigés par un vrai être humain, si le "master spin est d'excellente qualité", selon l'expression consacrée. Ainsi, le texte pris en exemple dans l'image ci-dessus est un texte spinné de mauvaise qualité.
Mais le problème ne change guère : en fait, cela signifie que le produit dopant devient indétectable donc que tout le monde doit en prendre, vu son efficacité, pour l'optimisation d'un site. De ce fait, la comparaison avec le dopage (et le fait que celui-ci s'impose à tout le monde) devient encore plus pertinente ! Enfin, ce qu'on voit, c'est qu'il est inutile de prendre le temps de rédiger des textes spinnés indétectables : un réseau de textes spinnés de très mauvaise qualité suffit à positionner un site sans contenu devant de vrais sites sans aucune pénalisation, c'était là précisément l'objet de l'article : partager cet étonnant constat.
Merci à ceux qui m'ont laissé un commentaire et qui m'ont ainsi permis de corriger cet article, entre autres des spécialistes du content spinning, Papy Spinning et Cédric d'Effi10.
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